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SALE TEMPS POUR LES POPULISTES


Depuis quelque temps les populistes enregistrent quelques déboires !

Soyons précis : l'étiquette populiste, commode mais imprécise, recouvre des réalités extrêmement diverses allant de gouvernements élus démocratiquement mais dérivant vers un discours démagogique jusqu'à des autocrates ayant réussi à verrouiller le pouvoir d'une manière durable. Salvini, Johnson et Netanyahou, assis sur des sièges éjectables, ne sont pas dans une situation comparable aux inamovibles Poutine et Erdogan. Les points communs à tous sont un discours qui flatte les électeurs dans le sens du poil, exacerbe les tensions en désignant à la vindicte publique des « ennemis du peuple » et un style de gouvernement qui tente de s'affranchir de toutes les règles.

Revenons à notre inventaire que nous limiterons à l'Europe et à quelques pays dont nous sommes proches culturellement et stratégiquement.

Au Royaume-Uni, Boris Johnson subit camouflets sur camouflets, infligés par la Chambre des Communes puis par la Cour suprême; il voit sa majorité parlementaire fondre et des ministres démissionner. Son projet de faire passer en force le Brexit sans accord semble avoir du plomb dans l'aile.

En Italie, Matteo Salvini a tenté un coup de poker pour faire sauter une coalition hétéroclite et ramasser la mise. Mais c'était sans compter avec le premier ministre Giuseppe Conte qui s'est révélé être un fin manœuvrier et a constitué une nouvelle coalition, certes tout aussi hétérogène et fragile, pour gouverner sans Salvini.

En Autriche, le parti d'extrême droite "de la liberté" (F.P.Ö), associé au pouvoir, est englué dans un scandale de tentative de corruption du chef du parti (et ex vice-chancelier). Il a perdu des plumes lors des élections législatives du 29 septembre (-10 points, à 16%), ce qui pourrait permettre au chancelier Kurz (conservateur), vainqueur de ces élections, de s'associer aux Verts de préférence au F.P.Ö.

En Israël, malgré une campagne d'une violence inouïe, Benyamin Natanyahou n'a pas réussi à reconduire sa coalition avec l'extrême droite et, sans majorité, le pays est dans l'impasse.

Aux États-Unis, Donald Trump, avec son comportement erratique, imprévisible et imprudent, fédère des haines tenaces et une procédure de destitution a été lancée contre lui.

Erdogan et Poutine représentent le stade ultime de l'évolution du populisme qui aboutit à une quasi dictature. Ils ont tenté d'empêcher la grogne de s'exprimer à l'occasion de scrutins municipaux mais les manœuvres d'intimidation n'ont pas pu empêcher l'opposition de percer dans les grandes villes, moins facilement contrôlables.

Au Royaume-Uni, en Italie, en Israël et aux États-Unis, la constitution est appliquée, les médias demeurent libres et les contre pouvoirs fonctionnent correctement : une réversibilité est envisageable.

En Turquie et en Russie, les contre pouvoirs n'existent plus, les O.N.G. sont discréditées, la justice est instrumentalisée, les médias d'opposition sont menacés et la constitution est devenue un document purement formel : aucune alternance pacifique ne semble en vue.

Quels enseignements tirer de cet "inventaire" ?

[if !supportLists]– Que les contre pouvoirs doivent être protégés même si leurs décisions ou leurs commentaires déplaisent à certains politiciens.

[if !supportLists]– Que les discours clivants et outranciers déchirent durablement l'opinion et qu'il sera difficile de relancer un débat apaisé.

[if !supportLists]– Que rien n'est jamais acquis. Le temps peut redevenir favorable pour les populistes car aucune des braises sur lesquelles ils soufflent ne sont éteintes : sentiment de déclassement et d'injustice, perte de confiance dans les élites, crainte de l'avenir...

Mais le beau temps peut aussi revenir au bénéfice d'une démocratie apaisée et respectueuse des oppositions.

Frédéric Bourquin, président de la Maison de l'Europe de Nîmes.

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