L’attrait du pouvoir passe-t-il avant l’intégrité de conviction ?
Lors des journées parlementaires du parti Les Républicains à Nîmes le 9 septembre, Michel Barnier déclarait à propos de l’idée d’un référendum pour permettre à la France de retrouver sa «liberté de manœuvre» en matière d’immigration : « Nous ne pouvons pas faire tout cela sans avoir retrouvé notre souveraineté juridique, en étant menacés en permanence d’un arrêt ou d’une condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne ou de la Convention européenne des droits de l’homme, ou d’une interprétation de notre propre institution judiciaire», appelant au passage à une «mise à plat de toutes les dérives», y compris en matière de regroupement familial.
L'intervention de l'ex-commissaire européen inquiète d'autant plus qu'elle intervient dans un contexte délétère de contestation des valeurs et de l'autorité européennes, notamment à l'est de l'Europe, en Hongrie et en Pologne, gouvernées par des partis illibéraux, ouvertement nationalistes et souverainistes.
Comment Michel Barnier, deux fois commissaire européen et négociateur en chef du Brexit, fin connaisseur de la législation européenne, et qui défendait bec et ongles la primauté de la Cour de Justice de l’UE et de la CEDH durant la négociation du Brexit, en est-il arrivé là ?
L’attrait mystérieux et irrésistible du pouvoir….
La préparation de l’élection présidentielle d’avril 2022 est déjà bien lancée. Et pour se distinguer et être désigné comme candidat par son parti, la surenchère est de mise, quitte à piétiner ses propres convictions humanistes et européennes. Est-ce une bonne politique que de s’appuyer sur la peur de l’Autre et un nationalisme exacerbé ? Que ne ferait-on pas pour s’approcher de l’Élysée, ce lieu délicieux de la mythologie grecque et du pouvoir parisien ?
Carton rouge, donc, à Michel Barnier, que nous connaissions jusque-là comme un européen convaincu et qui perd par cette déclaration, remarquée avec stupéfaction dans toute l’Europe, beaucoup de l’aura positive dont il jouissait tant en France que dans l’U.E.
Charles-Antoine Roussy, président de la Maison de l’Europe de Nîmes
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