La forêt de Bondy
La forêt de Bondy est une forêt située à 15 km à l'est de Paris et qui avait triste réputation : Childéric II, roi d'Austrasie y fut assassiné par des brigands en 675 ; beaucoup plus tard au cours du Moyen-Âge trois marchands furent sauvés d'autres brigands par des anges ; Victor Hugo s'est inspiré de cet endroit maudit pour situer la ferme des Thénardier dans les Misérables. En résumé, pendant longtemps, ce fut une zone de non-droit où la loi du plus fort régnait !
La scène internationale ressemble de plus en plus à cette forêt dangereuse. Pour se limiter à la seule grande Europe (celle du Conseil de l'Europe), on a d'abord vu le brigand Poutine détrousser la Géorgie de l'Abkhazie et de l'Ossétie du sud en 2008, puis enlever la Crimée à l'Ukraine en 2014 avant de l'envahir en 2022. Maintenant c'est Aliyev, le dirigeant de l'Azerbaïdjan, qui fait main basse sur le Haut Karabakh. Au Kosovo, la semaine dernière, une bande armée serbe a tué un policier et a terrorisé le nord du pays.
A chaque fois, les organisations internationales d'arbitrage et de conciliation sont ignorées ou méprisées. D'ailleurs l'instance internationale de « police », le Conseil de sécurité de l'O.N.U., est paralysée par le veto de la Russie et de la Chine.
On pouvait penser que la vie internationale se civiliserait progressivement et qu'après les deux guerres mondiales, les différends se régleraient désormais grâce aux diplomates réunis autour d'une table ou à la barre d'un tribunal international. D'ailleurs, l'Union européenne avait été bâtie sur ce postulat mais le propre des postulats c'est de ne pouvoir être vérifiés ! Comme l'a dit Ursula Von der Leyen dans son discours sur l'état de l'Union « Notre Union aujourd'hui reflète la vision de ceux qui ont rêvé d'un avenir meilleur après la seconde Guerre Mondiale ».
Pourquoi ce retour en force de la brutalité et du cynisme dans les relations internationales bien qu'ils n'aient jamais complètement disparu ? Des dirigeants sans scrupules ont bien compris qu'il existe un carburant très inflammable qui traîne au sein de chaque peuple, le nationalisme. Une simple mèche suffit : désigner un « autre », responsable de tous les maux dont souffre le peuple (le bon, le vrai...). Ce peut être des ennemis intérieurs (des minorités ethniques, linguistiques, sexuelles, religieuses ou des immigrés...) ou extérieurs (le voisin honni) qu'il faut annihiler par tous les moyens.
Espérons que la prochaine campagne des européennes permettra de démonter les arguments de tous ceux qui considèrent que les problèmes qui nous assaillent sont dus aux autres et qu'en « neutralisant » ces derniers on fera disparaître les premiers.
Frédéric BOURQUIN, président de la Maison de l'Europe de Nîmes
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