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Le chômage, c’est désormais aussi l’affaire de l’Europe


En février 2020, avant le confinement


Rectification : non pas le chômage, car celui-ci a toujours été au cœur des préoccupations européennes, mais son indemnisation. Certains diront : enfin ! Depuis le temps qu’on attend une dimension sociale de l’Europe qui soit réelle et surtout visible - car, nous le disons souvent, l’Europe sociale existe déjà, mais nous ne le savons pas toujours- voilà une vraie bonne nouvelle. Il aura fallu une épidémie, mais ne boudons pas notre plaisir : d’un mal peut sortir un bien.

La Commission propose en effet un nouveau dispositif pour aider les États-membres à contrer le chômage, au moins dans sa version « temporaire, à temps partiel », une fois le déconfinement achevé. Ça s’appelle SURE, pour Support to mitigate Unemployment Risks in an Emergency, (en bon français système d’atténuation du risque de chômage en situation d’urgence).

De quoi s’agit-il ?

D’un fonds doté d'une enveloppe allant jusqu'à 100 milliards d'euros, destinés à être prêtés aux États membres. Ces prêts les aideront, en cas de besoin, à financer la création ou l'extension de dispositifs nationaux de chômage partiel mis en place en réaction à l'actuelle pandémie de coronavirus, et ce aussi bien pour les salariés que, sous d’autres formes, pour les indépendants.

Lorsque le confinement a été décrété, beaucoup d’entre nous ont découvert le régime de chômage partiel temporaire. L’idée était de maintenir un revenu presque intégral à tous ceux, nombreux, qui ne pouvaient ni se rendre à leur travail ni travailler à distance ou dont l'entreprise avait dû réduire son activité. Le système a été assez commenté pour qu’il soit inutile d’y revenir ; réjouissons-nous de son existence.

Le problème est que même en admettant que tout le monde retrouve son emploi et son salaire - et nous savons que ce ne sera pas le cas - cette période pèsera lourd sur les régimes d’assurance chômage. Ceux-ci existent, sous des formes diverses, dans tous les pays de l’UE, mais dans un contexte de crise, ils pourraient s’avérer insuffisants. L’intervention de la Commission serait en quelque sorte une réassurance-chômage, visant à éviter les défauts de paiement de ces régimes.

Point important : il n’y a pas d’enveloppe pré-affectée aux États-membres en fonction de leur poids démographique ou même de leur niveau économique ; les droits de tirage seront honorés en fonction des besoins réellement constatés. Il s’agit donc bien de solidarité. D’autre part, ce système n’est pas purement technique ou administratif, puisque les arbitrages éventuels resteront de la compétence du Conseil de l'UE.

Comment la Commission compte-t-elle obtenir et fournir les financements nécessaires à l'instrument SURE?

C’est un emprunt de la Commission sur les marchés financiers qui financera les prêts accordés ensuite aux États membres, à des conditions favorables. Les États membres profiteront donc de la bonne cote de crédit de l'UE (que traduit son excellente notation sur les marchés financiers), d'où de faibles coûts d'emprunt.

Mais, dira-t-on, il ne s’agit donc que de prêts ?

Certes, mais consentis à des conditions beaucoup plus avantageuses que celles dont bénéficieraient les États « mal notés » sur les marchés financiers. Pensons à l’Italie ou à la Grèce. Au final, ce système permettra de maintenir à proximité de leur emploi, tout en leur garantissant un revenu de remplacement, des personnes qui risqueraient, sans cela, de se voir exclues durablement du marché du travail.

Et pour la suite ?

Une fois approuvé par le Conseil de l'UE, ce nouvel instrument sera limité, dans sa durée et son champ d'application, à la lutte contre les conséquences de la pandémie actuelle. Mais il est en cohérence avec un objectif déjà annoncé par Ursula von der Leyen lors de sa prise de fonctions : celui d’un régime européen permanent de réassurance-chômage. Répondant à une urgence, l'instrument SURE en est en quelque sorte la préfiguration, d’autant qu’il semble recueillir l’approbation de tous les États-membres, au moins dans ses grandes lignes.

Nous suivrons avec intérêt et vigilance l’évolution de ce projet, qui s’ajoute d’ailleurs à d’autres propositions de la Commission visant à relancer, soutenir ou infléchir l’investissement (cf le Green Deal, dont il sera question sous peu). Sur ce projet et sur les autres, les euro-députés auront également leur mot à dire. Espérons qu’une fois la crise apaisée, il suivra son cours. Mais d’ores et déjà, il constitue une avancée inédite et courageuse, qui va dans le sens d’une vraie solidarité européenne.

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