Résilience ! vous avez dit résilience ?
Voilà un mot qui fait fureur dans les médias : la « résilience ». Celle-ci est mise à toutes les sauces pour vanter la capacité des Ukrainiens à se relever malgré le traumatisme de la guerre. Peu nombreux savent qu’il s’agit en physique du degré de résistance d’un métal au choc, que cela représente aussi la capacité des écosystèmes à se régénérer, ou la tolérance aux pannes d’un système complexe.
Suis-je résilient ? Nous nous posons tous la question : et si c’était moi qui étais à Kiev ou à Karkhiv, comment me comporterai-je ? Partirais-je au combat ? C’est cette angoisse qui, s’ajoutant à d’autres générées par les images violentes et les commentaires répétitifs, engendre chez la plupart des européens une culpabilité sourde et une anxiété de plus en plus grande en face de cette guerre insupportable.
L’Union européenne a été créée pour éviter les guerres qui émergeaient régulièrement entre nos peuples jusqu’au milieu du XX° siècle. Nous vivons donc cette guerre en Ukraine comme un échec patent, une verrue dans un XXI° siècle mondialisé et presque en paix sur notre continent.
Nous avons naïvement cru que Donald TRUMP était le champion du monde des « fausses nouvelles ». Mais Vladimir POUTINE est très bien placé pour le titre, lui qui réussit à fait croire à la grande majorité de ses concitoyens que les nazis ukrainiens vont les attaquer, et que donc des « opérations militaires préventives » sont légitimes.
Mais une autre guerre se développe depuis des années, aux USA comme en Russie, en Chine comme au Liban, au Mali comme en Corée du Nord. Elle est plus pernicieuse. Elle fait rage quotidiennement sur Facebook, Twitter, CNN, BFMTV, RUSSIA Today ou le Quotidien du Peuple…
C’est la guerre de l’information.
Nous devons admettre que la diffusion continue de désinformation est capable de créer des affrontements violents, des guerres interminables conventionnelles ou non, mais avec autant de violence et de morts. L’objectif est de déstabiliser l’adversaire en versant de l’huile sur le feu à chaque incident, de saper la confiance des citoyens dans leurs institutions et surtout d’affirmer haut et fort n’importe quoi pourvu que cela déstabilise la population adverse. Tout ce qui peut affaiblir l’autre et le fragiliser est bon à prendre. Cette guerre, qui ne dit pas son nom, a fait des centaines de milliers de morts au cours de révolutions plus ou moins spontanées, de coups d’états télécommandés, de manipulations éhontées des cours des matières premières, entraînant des émeutes de la faim, des exodes de population et des génocides plus ou moins téléguidés. Et le plus beau c’est que nous finançons cette guerre nous-mêmes en grande partie.
L’Europe ne doit pas se tromper de guerre. Un missile de 20 kg détruit aisément un avion ou un char de plusieurs millions d’euros. Une petite armée motivée peut tenir en respect un certain temps l’ours de l’armée rouge. Mais la mise en cause de notre espace démocratique pourra se faire sans armes par le détournement de nos valeurs et la corruption de nos cultures. Tout cela sera organisé par d’autres, grâce à la manipulation performante et itérative de l’information.
L’Europe doit se défendre plus énergiquement, contre les mots comme contre les armes. Elle en a les moyens, il est temps de les prendre.
Charles-Antoine ROUSSY
Président de la Maison de l’Europe de Nîmes
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