Valery Giscard d’Estaing : décès d’un européen engagé
L’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing est mort mercredi 2 décembre à l’âge de 94 ans.
Valéry Giscard d’Estaing au Parlement européen, en 2016 - Crédits : Aurore Belot / Parlement européen
La presse internationale lui rend un hommage unanime et retrace son engagement constant pour la construction européenne
"Européen convaincu" [Libération], "pragmatique" [FAZ], "grand Européen et fidèle ami des Allemands" [die Welt], "bâtisseur d’une Europe unie", [La Repubblica], "architecte clé de l’intégration européenne" [Reuters], "promoteur de la construction européenne" [El País]...
"Nos États sont trop petits pour résoudre certains problèmes. Si nous voulons encore jouer un rôle dans un monde de six milliards d'habitants, nous ne pouvons plus tout faire seuls. C'est pourquoi l'Europe est une nécessité", affirmait l’ancien chef d’État à la Süddeutsche Zeitung
"Comme président, comme parlementaire aussi bien à Paris qu’à Strasbourg, et comme citoyen, Valéry Giscard d’Estaing a cru toute sa vie à l’unité européenne et a œuvré par cela", résume Pierre Haski sur France Inter. Jusqu’à la fin, "l'unification politique de l'Europe est restée l'œuvre de la vie de Giscard", poursuit die Welt. "Ses arguments en faveur de la coopération communautaire ont toujours été pragmatiques, peu idéologiques. Les projets retentissants de M. Giscard s'inscrivaient dans l'idée d'une Europe pacifiquement unie, mais pour lui, ils étaient surtout convaincants sur le plan pratique", écrit la Süddeutsche Zeitung.
"Durant sa présidence de 1974 à 1981, il a conduit l'Europe avec un pragmatisme sans faille vers
l'union monétaire commune, et il a réformé fondamentalement la Communauté européenne", complète la Süddeutsche Zeitung.
Le journal allemand revient également sur l’amitié forte que le chef de l’Etat entretenait avec son homologue allemand Helmut Schmidt, inaugurant "une remarquable tradition franco-allemande qui a franchi les frontières politiques ». La tradition s’est poursuivie mais c’est de cette période "que date l’apparition de l’expression ‘couple franco-allemand’" [Ouest-France].
Le président français et le chancelier allemand avaient tous deux « pour objectif principal l'union monétaire. Ensemble, ils ont conçu le système monétaire commun de l'Union européenne à la fin des années 70 et ont partagé la paternité de l'euro", complète la Süddeutsche Zeitung. C’est en effet "la stabilité croissante que le SME a donnée aux monnaies européennes au cours de la décennie 1979-1989 qui a incité les gouvernements à prévoir une union monétaire complète dans le traité de Maastricht", renchérit le quotidien britannique [Financial Times].
C’est aussi "avec Helmut Schmidt, [qu’il] a [...] lancé le Conseil européen, l'organe de décision des chefs d'État et de gouvernement", rappelle Die Welt. Cette décision est alors vue comme une action préférant la coopération entre les Etats à l’intégration communautaire. « En contrepartie, la France est pressée d’accepter l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct, dont les premières élections ont lieu en 1979", complète Le Monde.
Son engagement européen ne faiblit pas après son départ de l’Elysée. Il entre au Parlement européen lors des élections européennes de 1989. "Il préside également le Mouvement européen de 1989 à 1997", poursuit Le Monde. En 1992, "il a épaulé Mitterrand [...] pour faire adopter par référendum le traité de Maastricht", rappelle Libération.
En décembre 2001, Valéry Giscard d’Estaing est nommé président de la Convention sur l’avenir de l’Europe, dont les travaux devaient établir une Constitution pour l’Europe. Il prend alors "une part active, en avril et mai 2005, à la campagne pour le ‘oui’ au référendum à propos du traité constitutionnel européen voulu par Jacques Chirac", note Le Monde.
L’échec du référendum en 2005 sur ce texte, qui représente la "première crise majeure dans le processus d’intégration", ne décourage pas l’ancien chef d’État, analyse le Corriere della Sera, "C'est lui qui, pensant aux Britanniques, avait écrit la substance de l'article 50 sur la sortie d'un État membre". "Lorsque j'ai préparé la Constitution européenne, j'ai écrit le texte d'un article intitulé ‘la sortie volontaire d'un État membre’, qui répondait à la crainte, principalement anglo-saxonne, qu'une fois entré en Europe, on ne puisse plus en sortir. Maintenant que Londres quitte l'UE, je ne suis plus aussi impressionné. Ils laissent quelque chose dont ils ne faisaient partie qu’à moitié", racontait-il au journal italien.
Au printemps dernier, en pleine pandémie de Covid-19, "il avait encore signé une carte blanche (notamment avec l’ancien Premier ministre italien Enrico Letta) dans divers médias européens, dont Le Soir, appelant alors à ce que la santé devienne une compétence communautaire" [Le Soir]. "Que les dirigeants européens fassent preuve de courage et parlent d’une même voix pour apporter toute l’aide nécessaire aux pays les plus cruellement touchés par le coronavirus !", soulignait cette tribune qui concluait à "la nécessité d’un Trésor public européen capable de gérer les besoins d’emprunt des États. Un projet qui trouvera une ébauche de concrétisation trois mois plus tard, avec le plan de relance porté par Macron et Merkel", selon Libération. "S’il est un sujet sur lequel il n’aura pas varié, c’est bien celui de l’Europe”, conclut Pierre Haski sur France Inter.
Source : Toute l’Europe
Comments