Des juges pour Poutine, mais à quand le procès ?
- ciednimes
- il y a 2 jours
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L’Ukraine et ses alliés européens ont approuvé le 9 mai la création d’un tribunal spécial chargé de juger les crimes d’agression commis par la Russie en Ukraine. Ce tribunal sera mis en place dans le cadre du Conseil de l’Europe.
Pourquoi créer un nouveau tribunal alors que la Cour pénale internationale (C.P.I.) existe depuis 2002 ?Le 17 mars 2023, la Chambre préliminaire II de la C.P.I. a délivré des mandats d’arrêt à l’encontre de Vladimir Vladimirovitch Poutine, Président de la Fédération de Russie, et de Maria Alekseïevna Lvova-Belova, Commissaire aux droits de l'enfant au sein du Cabinet du Président de la Fédération de Russie. Au vu des demandes présentées par l’Accusation le 22 février 2023, la Chambre préliminaire II a estimé qu'il existe des motifs raisonnables de croire que la responsabilité de chacun des suspects est engagée à raison du crime de guerre de déportation illégale de population et du crime de guerre de transfert illégal de population depuis certaines zones occupées de l’Ukraine vers la Fédération de Russie, ces crimes ayant été commis à l’encontre d’enfants ukrainiens.
Le crime d’agression de la Russie à l’encontre de l’Ukraine ne peut pas être traité par la C.P.I., car ces deux États ne sont pas membres de cette Cour ; c’est la raison de la création de ce tribunal spécial.
Qu’est-ce que le crime d’agression ? Il y a crime d’agression lorsque les dirigeants d’un État déclenchent ou planifient une guerre. Il s’agit d’un crime de dirigeants, car il est décidé par des personnes investies d’un pouvoir qui ont pris ou facilité la décision d’entrer en guerre. Ce crime est défini par le droit international depuis les accords de Londres (8 août 1945) créant le Tribunal militaire international de Nuremberg (1945-1946) qui l’a utilisé contre les dignitaires nazis ; à l’époque, on parlait de crime contre la paix. Il est d’autre part défini précisément dans le Statut de Rome (1998), qui a créé la Cour pénale internationale, mais celle-ci n’est réellement compétente sur ce sujet que depuis 2018 (ratification de cette compétence par les États membres de la Cour).
Il existe, pour le moment, un obstacle juridique, car les chefs d’État, les chefs de gouvernement et les ministres des Affaires étrangères en exercice bénéficient d’une immunité en droit international (Convention de Vienne, 18 avril 1961). Ces personnes ne pourront donc être traduites devant le tribunal que lorsqu’elles ne seront plus au pouvoir, et pour autant qu’elles soient arrêtées et lui soient livrées.
Ce n’est donc pas demain que nous verrons Poutine derrière les barreaux ! Néanmoins, ces dernières décennies, des dirigeants qui semblaient inatteignables ont dû répondre de leurs crimes devant un tribunal international : les présidents serbe Slobodan Milosevic, libérien Charles Taylor, tchadien Hissène Habré, et certains génocidaires cambodgiens ont comparu et ont été condamnés.
F. Bourquin
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