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L’Europe sociale continue d’avancer. Nouvel exemple : l’Autorité européenne du Travail

Chose promise, chose faite. En arrivant à la tête de la Commission européenne en 2014, Jean-Claude Juncker s’était engagé à mener à bien certains chantiers laissés en attente par son prédécesseur. Parmi ces dossiers, celui des travailleurs détachés, la directive les concernant devant être révisée de fond en comble pour tenir compte du nouveau contexte européen - la directive initiale datait en effet de 1996, et s’appliquait à une Europe à 15. Cela supposait donc un travail sur les textes, mais aussi la création de nouveaux moyens d’action pour que la Commission puisse pleinement jouer son rôle.

La mise en place d’une Autorité européenne du Travail (appelons-la AET), annoncée par Juncker en 2017, a vu le jour en juillet 2019 (un délai très bref à l’échelle de l’UE), après que le Parlement européen de l’époque en ait fait une de ses toutes dernières décisions avant la fin de sa mandature.


De quoi s’agit-il ?

Non pas d’une super-inspection du travail qui se saisirait de tous les conflits et qui pourrait non seulement contrôler, mais aussi sanctionner : nous n’en sommes pas là. On peut même dire que c’est cet aspect faiblement répressif qui a permis à cette nouvelle agence européenne de voir le jour à la faveur d’un vote unanime du Conseil de l’UE ; ceux qui voient le verre à moitié vide n’ont d’ailleurs pas manqué de le regretter. Dans un premier temps, sa mission principale se décline surtout à travers des objectifs qui ne mangent pas trop de pain, si l’on peut dire : « aider », « informer », « faciliter », « observer », « coordonner », « soutenir », etc.


Il n’empêche, et les partisans d’une Europe plus fédérale ne s’y sont pas trompés (ses adversaires non plus, du reste, qui ont cherché à saboter le projet) : il s’agit bien d’une avancée de l’Europe sociale. L’AET, quand elle sera réellement opérationnelle, en 2024, offrira un cadre non seulement de concertation mais aussi d’action pour que se mettent en place des coopérations renforcées à plusieurs niveaux : sur le travail non déclaré, sur le non-respect des règles du travail détaché, sur la coordination des régimes de sécurité sociale des travailleurs mobiles, sur les conditions d’emploi des transfrontaliers, sur les reconnaissances des qualifications, etc. Même la protection des travailleurs, compétence européenne puisqu’elle est un ingrédient de la concurrence loyale entre acteurs économiques, pourra faire l’objet d’enquêtes initiées ou diligentées par l’AET, en collaboration avec les autorités locales de contrôle - qui ne perdent rien de leur autonomie ni de leur compétence.


Bref, s’il est vrai que tout ne se fait pas d’un coup de baguette magique, ce que nous savons depuis longtemps, il n‘en reste pas moins que la volonté politique, quand elle s’exprime nettement, finit tôt ou tard par trouver sa traduction dans les faits. Gageons que les 144 collaborateurs de l’AET qui seront, dès que possible, installés à Bratislava, siège de cette nouvelle Agence, auront du pain sur la planche et quelques moyens pour agir efficacement. Un budget de 50 millions d’€ sera mis à leur disposition, soit 0,03% du probable budget de l’UE : c’est peu, dira-t-on. Exact. Mais toujours plus que ce qui existe aujourd’hui, à savoir rien du tout.


Affaire à suivre, donc.


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