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La présidence tournante du Conseil de l'U.E.


En janvier 2020, la Finlande va transmettre la présidence tournante à la Croatie pour les 6 prochains mois.

C'est un rituel bien rodé : depuis 1952, année de la création de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (C.E.C.A.), chaque semestre 1 un État membre prend la présidence du Conseil de l'Union européenne. Cela passe relativement inaperçu du grand public car 6 mois c'est court pour révolutionner l'Europe ; de plus, ce n'est pas un homme qui prend la présidence mais un État ! Néanmoins, dans le pays auquel incombe cette présidence, le gouvernement se charge de mettre en scène son action : annonce d'un programme ambitieux, médiatisation de l'action des dirigeants nationaux sur la scène européenne, mise en valeur flatteuse d'un bilan forcement réduit. Au moins, pendant ces 6 mois, on entend parler de l'U.E d'une manière positive dans un pays de l'Union !

Les Conseils dans le Conseil

Le Conseil de l'Union européenne (ex-Conseil des ministres) est, avec le Parlement européen, l'organe législatif de l'U.E ; il représente les États membres et assure la liaison avec les institutions européennes.

Le Conseil se compose d'un représentant de chaque État membre au niveau ministériel, « habilité à engager le gouvernement de l’État membre qu'il représente » ; cela signifie que pour les États fédéraux (Allemagne, Belgique), des ministres des entités fédérées peuvent y participer.

Le Conseil siège le plus souvent à Bruxelles, certaines réunions ayant lieu à Luxembourg. Les ministres, différents selon les sujets traités, se réunissent en dix formations spécialisées: "Agriculture et pêche", "Compétitivité", "Justice et affaires intérieures", "Emploi, politique sociale, santé et consommateurs", "Transports, télécommunications et énergie", "Affaires étrangères", "Affaires économiques et financières", "Éducation, jeunesse, culture et sport", "Environnement" et "Affaires générales".

Cette dernière formation a un rôle de coordination des autres .

Les hommes de l'ombre

Deux institutions discrètes aident le Conseil :

[if !supportLists]– [endif]Le COREPER (Comité des représentants permanents, c'est à dire les ambassadeurs des pays membres ou leurs adjoints) prépare en amont les décisions que le Conseil n'a souvent plus qu'a entériner, seuls les dossiers n'ayant pas fait l'objet d'un « préaccord » au COREPER sont réellement discutés entre les ministres.

[if !supportLists]– [endif]Le Secrétariat général assure l'organisation, la coordination et le contrôle de la cohérence des travaux des formations du Conseil.

La réforme introduite par le traité de Lisbonne (2007)

Le principe des présidences tournantes s'appliquait à toutes les formations du Conseil de l'Union européenne et au Conseil européen (réunion des chefs d’État ou de gouvernement). Le traité de Lisbonne a introduit deux innovations importantes en créant deux présidents à plein temps :

[if !supportLists]– [endif]Le Conseil européen élit désormais son président pour 2 ans et demi renouvelables une fois. Jusqu'alors, le premier ministre de l’État assurant la présidence tournante devait cumuler cette tâche avec son rôle dans son propre pays.

[if !supportLists]– [endif]Le Conseil des Affaires étrangères est maintenant présidé par le vice-président de la Commission ayant le titre de « haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité ». Avant cette réforme, l'Union avait « deux n°s de téléphone »² : la présidence tournante du Conseil « Affaires étrangères » et le Haut représentant, créé en 1999 ; l'un des deux est supprimé mais la création d'un président permanent du Conseil européen ne va-t-elle pas ajouter un nouveau n° de téléphone ?

La troïka

Pour tenir compte de la brièveté de cette présidence tournante, éviter les risques d'incohérences entre les présidences successives et prendre en compte les capacités administratives et diplomatiques limitées de certains « petits » États, il a été créé un système de « triplets » (ou troïka) associant l’État qui assure la présidence avec son prédécesseur et son successeur. Par exemple, le « triplet » n°9, actuellement en vigueur, associe la Roumanie (1er semestre 2019), la Finlande (2ème semestre 2019) et la Croatie (1er semestre 2020). Le prochain triplet (n° 10, juillet 2020 – décembre 2021) associera l'Allemagne, le Portugal et la Slovénie. La France apparaîtra (janvier-juin 2022) dans le triplet n°11. Ainsi, ce système de coopération entre trois États qui se succèdent permet une continuité dans le traitement des dossiers. L'ordre dans lequel les États assurent les présidences est fixé à l'unanimité par le Conseil de l'UE.

La prise de décision

Selon la matière en cause, le Conseil prend ses décisions à la majorité simple, à la majorité qualifiée ou à l'unanimité. Depuis le traité de Lisbonne, dans les cas qui exigent un vote à la majorité qualifiée, la décision doit réunir au moins 55% du nombre d’États membres, ces derniers devant représenter au moins 65% de la population de l'Union. Souvent, le Conseil décide par consensus (c'est-à-dire unanimité tacite), dès lors que la décision ne soulève pas d'opposition.

Évolution du rôle du Conseil de l'UE

Au début de la construction européenne et jusque dans les années 70, le Conseil de l'UE était omnipotent : l'Assemblée parlementaire n'avait qu'un rôle consultatif et de contrôle de la Commission, il y avait un exécutif différent par Communauté (C.E.C.A, C.E.E, Euratom) et les chefs d’État ou de gouvernement ne se réunissaient qu'exceptionnellement.

Un certain nombre d'évolutions ont réduit le rôle du Conseil de l'UE :

[if !supportLists]– [endif]La fusion, en 1967, des Commissions 3 des trois Communautés ; désormais les ministres ont, comme interlocutrice, une Commission unique, la Commission européenne.

[if !supportLists]– [endif]La création du Conseil européen en 1974, réunissant régulièrement les chefs d'État ou de gouvernement ; il aspira très rapidement les dossiers les plus politiques au détriment du Conseil de l'UE... souvent, il faut le dire, soulagé de passer la patate chaude aux chefs d’État ou de gouvernement!

[if !supportLists]– [endif]L'élection du Parlement européen (ex Assemblée parlementaire) au suffrage universel direct à partir de 1979 ; il s'est largement appuyé sur sa nouvelle légitimité pour réclamer et obtenir de nouveaux pouvoirs, en prenant pour modèle les parlements nationaux. D'ailleurs, les traités successifs (Acte unique en 1986, traités de Maastricht en 1992, d'Amsterdam en 1997, de Nice en 2001 et de Lisbonne en 2007) ont progressivement érigé le Parlement en co-législateur, à égalité avec le Conseil.

Le travail du Conseil de l'UE n'est pas facile :

[if !supportLists]– [endif]Il a un ordre du jour très chargé alors qu'il ne siège pas en permanence (1 réunion par mois pour les Conseils Affaires économiques et financières, Affaires générales, Affaires étrangères, moins pour les autres formations),

[if !supportLists]– [endif]La coordination des différentes formations par le Conseil « Affaires générales » n'est pas aisée ;

[if !supportLists]– [endif]Le nombre de participants est trop élevé (28 ministres, un ou plusieurs commissaires et leurs conseillers) ;

[if !supportLists]– [endif]Malgré les « triplets », les présidences ont une durée trop brève,

Néanmoins, aucune législation européenne, aucun budget ne peuvent être votés sans l'accord du Conseil de l'U.E; quant à la présidence tournante, elle a maintenant un rôle essentiellement valorisant pour le gouvernement titulaire qui peut ainsi pousser ses priorités sur le devant de la scène.

A quand une nouvelle évolution institutionnelle, avec par exemple la création d'une seconde chambre représentant les parlements des États membres, tel que cela existe dans presque tous les États fédéraux ? Cela bouleverserait le rôle du Conseil !

Rappelons enfin que le Mouvement européen du Gard (MEF30) organise chaque semestre une réunion publique pour faire le bilan de la dernière présidence semestrielle ; rendez-vous le 16 janvier 2020 pour le bilan de la présidence finlandaise et faire connaissance avec ce pays si différent de notre région.

1 Jusqu'en 1967, la présidence de la C.E.C.A était trimestrielle.

² Selon une réflexion du secrétaire d’État américain Henry Kissinger en 1973 qui soulignait l'absence de l'Europe sur la scène internationale: « L'Europe, quel n° de téléphone ? »

3 Pour la C.E.C.A., l'exécutif s'appelait « Haute autorité ».

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