top of page

Lettre Europe juillet-aout 2023


Tribune:


Editorial juillet 2023


Une échéance importante va nous mobiliser l'année prochaine : les élections européennes.


Nous aurons à combattre deux tendances : l'hostilité à l'Union européenne et le désintérêt. Nous n'aurons pas trop de dix mois pour convaincre.


L'hostilité à l'U.E atteint des degrés différents : au mieux, l'euroscepticisme, au pire, l’anti-européisme.

Quitter l'Union ? Quel bonheur ! On va enfin reprendre notre liberté !


Demandez aux Britanniques, ce qu'ils en pensent : aux exportateurs et importateurs noyés sous la paperasse pour commercer avec le continent, aux étudiants, interdits d'échanges Erasmus, aux agriculteurs sevrés de subventions européennes, aux employeurs privés de main d’œuvre européenne, aux soignants qui ne voient toujours pas venir les milliards « économisés » grâce au Brexit.... De plus, l'immigration illégale devait se tarir en reprenant le contrôle des frontières ; elle n'a jamais été aussi importante !

Abandonner l'euro ? Quelle chance ! On va pouvoir faire des dévaluations « compétitives » !

Demandez aux Turcs, aux Libanais ce qu'ils pensent d'une monnaie fondant comme neige au soleil, avec l'évaporation de l'épargne, la hausse de l'énergie importée, les restrictions de change...

Désobéir aux règles de l'Union et contester les arrêts des tribunaux européens ? Quelle liberté ! On va pouvoir reprendre le contrôle !


Nous refuserons d'appliquer les règles qui ne nous plaisent pas donc, en rétorsion, nos partenaires en feront de même et à la fin il n'y aura plus de règles communes.

C'est comme jouer au football, refuser les règles du jeu et rejeter l'arbitre et ses décisions.... Ce ne sera plus du football mais du pugilat ! La vie internationale a besoin de règles communes reconnues et respectées sinon nous reviendrons à l'état de nature !


L'Union est imparfaite, comme toute construction humaine, inachevée comme toute œuvre commencée il y a peine 70 ans, alors que nos États-nations ont nécessité un ou deux millénaires pour arriver à émerger du chaos de l'histoire.


Nous entendrons aussi que l'U.E ne fait pas rêver avec ses directives, son fonctionnement institutionnel abscons, ses subventions complexes à obtenir...

Non, effectivement, ce n'est pas cela qui nous fait rêver mais le fait d'avoir réuni pacifiquement pour la première fois dans l'histoire du monde 27 États ayant, pour la plupart, une longue tradition de guerres sanglantes dont les deux dernières ont ravagé le continent et exterminé des populations entières. Aucune période historique n'a réussi à réunir pacifiquement autant d’États, aucun continent n'est arrivé à une union aussi large et aussi profonde. La guerre entre nous paraît non seulement improbable mais aussi impossible.

Des générations d'Européens, ravagés par les guerres incessantes, en ont rêvé depuis des siècles et cela nous laisse indifférent maintenant ?

D'ailleurs, cette Union qui semble si peu désirable à certains de nos concitoyens fait rêver au-delà de nos frontières européennes ; il n'y a qu'à voir le nombre de pays souhaitant rejoindre l'U.E, le nombre de migrants prêts à se déchirer sur les barbelés et à sombrer en Méditerranée pour atteindre cette Europe qui les fait rêver, eux !

Oui, l'Union européenne est désirable ! Faisons-la désirer à nos concitoyens !


F. Bourquin, président de la Maison de l'Europe.





Les nouvelles de l'Europe:





Droit d’asile et migrations en Europe : fiche d’étape


D’abord, un rappel pour préciser de quoi on parle. Constatons que dans le langage courant, on amalgame souvent « demandeurs d’asile » et « migrants ». On pourrait s’en formaliser, car les deux concepts sont assez différents pour interdire cette confusion. Dans la pratique, pourtant, il est devenu difficile de distinguer les deux réalités. En effet, si l’on excepte les migrants légaux, ceux qui entrent régulièrement dans un pays qui n’est pas le leur pour y séjourner (plus ou moins longuement), tous les autres, sans exception, sont demandeurs d’asile, ce qui ne fait pas d’eux des illégaux pour autant.


Dans la première catégorie, on trouve les étudiants, les personnes admises au regroupement familial, et les personnes bénéficiant d’un contrat d’introduction de main-d’œuvre, comme par exemple des saisonniers. Dans la deuxième, il y a, donc tous les autres, pour lesquels la seule chance de pouvoir être admis dans un pays avec lequel ils n’ont pas de lien particulier, est de demander l’asile. Ils sont donc des migrants irréguliers tant que leur demande d’asile n’a pas été au minimum enregistrée en vue d’être examinée, sans garantie sur la suite qui lui sera donnée.


Rectification : il existe une petite catégorie de demandeurs d’asile qui sont d’emblée en situation régulière ; ce sont les personnes qui ont obtenu dans leur pays d’origine un visa d’établissement leur reconnaissant le droit d’entrer dans le pays de destination pour y déposer une demande d’asile. Tous les gouvernements européens rêveraient de pouvoir généraliser cette seule procédure, cela simplifierait tellement les choses, tout en réduisant le flux à un simple filet. Inutile de dire que la chose est quasiment impossible, car on imagine aisément les difficultés pour un Afghan, un Soudanais ou un Syrien à effectuer pareille démarche dans son propre pays !


Autre rectification : il existe encore deux autres catégories de « migrants » qui ne sont pas considérés comme tels, même par les populations les plus méfiantes. À savoir les touristes, toujours bienvenus, surtout quand ils sont solvables (et ils le sont par définition) et les travailleurs détachés, qui sont obligatoirement des citoyens européens ou des personnes séjournant régulièrement dans leur pays de résidence.


Quoi qu’il en soit, ce qui pose problème aujourd’hui, et un problème majeur depuis 8 ans environ, c’est bien l’afflux massif de migrants demandeurs d’asile, dans l’immense majorité des cas pour des raisons largement compréhensibles (car qui ne rêve d’une vie meilleure et plus sûre), même lorsqu’il s’agit de situations moins dramatiques que celles des Syriens ou des Afghans.


Face à cette situation, une chose est certaine : la Commission européenne, dès le mandat de Jean-Claude Juncker (2014/2019), a pris le problème à bras-le corps et s’est aussitôt heurtée à la mauvaise volonté des Etats-membres, qu’elle soit revendiquée (cf. Viktor Orban entre autres) ou plus honteuse (c’est un peu le cas de la France, il faut bien le dire). Seule l’Allemagne de Merkel, à grand renfort de déclarations courageuses qui engageaient non seulement son gouvernement, mais le pays tout entier, a devancé l’appel avec sa proposition d’accueillir jusqu’à un million de migrants avec sa fameuse phrase « Wir schaffen das » - « on y arrivera », en quelque sorte un « Yes we can » à l’allemande.


Migrants en route vers l’Allemagne, 2015.C.Stadler/Bwag — Travail personnel, https://commons.wikimedia.org


Depuis, les choses n’ont guère bougé, malgré de nombreuses tentatives d’aboutir à un accord entre Etats-membres qui ne soit pas qu’un vœu pieux, mais qui ait véritablement un caractère contraignant, ce qui n’avait pas été possible jusqu’ici, ou du moins pas été suivi d’effets sur le terrain.


Voilà que la présidence suédoise a permis enfin de débloquer la situation, en faisant aboutir lors du Conseil du 8 juin 2023 un compromis sur deux propositions de règlements.


Le premier établit un cadre commun pour la gestion de l’asile et de la migration, en remplacement de l'actuel règlement de Dublin (Dublin III, pour être précis), dont le caractère à la fois inopérant et injuste est patent depuis la grande crise migratoire de 2015.


Le deuxième modifie les procédures obligatoires régissant les demandes d'asile aux frontières extérieures, avec la double préoccupation de la rapidité, de l’efficacité, mais aussi de la fermeté dans le cas des demandes d’asile manifestement « infondées ». On n’a pas fini de discuter sur ce que signifie une demande « infondée ». Mais la réalité européenne est ainsi faite que pour aboutir à des compromis -le contraire du compromis étant le désaccord ou la stagnation- il faut bien en passer par des définitions assez floues pour être acceptées de tous, et assez précises pour être opérationnelles.


Quoi qu’il en soit, ce compromis comprend aussi, et c’est une première, des dispositions contraignantes, comme celle d’obliger chaque Etat-membre à accueillir un certain nombre de personnes en provenance des pays de premier accueil, sous peine d’être astreints à une pénalité qui est tout sauf négligeable : 20 000 € par migrant « refusé » ( cf. l’article sur la présidence suédoise).


Bref, la Suède ne se contente pas de faire à bas bruit plus que sa part du travail (l’ambassadeur Åkesson rappelait le 26 juin, lors de sa venue à la Maison de l'Europe, que 150 000 migrants ont été accueillis au cours des dix dernières années en Suède. Pour 10 millions d’habitants ! Cela en représenterait sept fois plus en France : on est loin du compte !). Elle a aussi réussi à mettre ses partenaires autour de la table et a abouti à cet accord qui permet aujourd’hui de parler véritablement, sans langue de bois, d’un « Pacte européen pour l’asile et pour la migration ».


Soyons justes : les choses n’ont pas démarré le mois dernier. Le cadre européen pour l’asile et la migration est en constante reformulation depuis ...les accords de Schengen (1985). Et ce n’est pas fini. Du reste, ces nouveaux règlements doivent encore être approuvés par le Parlement européen, de préférence (c’est le souhait de la Commission) avant les élections européennes de juin 2024.


Autant dire que nous aurons l’occasion d’en reparler.


Jean-Luc BERNET





L’énergie nucléaire et l’Union européenne




Ce sujet suscite des controverses qui reposent plus souvent sur la passion ou la politique intérieure des États membres de l’UE que sur des arguments objectifs.

Certains États y sont farouchement opposés : l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, l’Espagne, l’Irlande, le Luxembourg, le Portugal...

D’autres en sont des partisans tout aussi déterminés, comme la France, la Bulgarie, la Finlande, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Tchéquie.

Et certains enfin observent et s’y intéressent de près comme l’Italie, les Pays-Bas ou la Suède, qu’ils aient déjà ou non des centrales nucléaires sur leur territoire.


Comment agit la Commission européenne, chef d’un orchestre dont les instrumentistes refusent de jouer la même partition ?

Le 1er semestre 2023 a connu plusieurs évolutions importantes, sous une double pression : la nécessité de ne plus dépendre autant du gaz importé de Russie, dont plusieurs robinets majeurs ont été fermés, et l’impératif de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’UE.


Tout d’abord la centrale EPR d’Olkiluoto 3 en Finlande, dont les équipements ont été fournis et installés par Framatome (France) pour la partie nucléaire et Siemens (Allemagne) pour la partie non nucléaire (turbine et alternateur, essentiellement) a commencé le 17 avril 2023 son exploitation pleinement commerciale, après beaucoup de difficultés et la fin de longs essais à pleine puissance (1 600 MW). C’est le 3ème EPR en service dans le monde, après Taishan 1 et 2 en Chine. Il fournira environ 15 % de l’électricité consommée en Finlande. Un baume au cœur pour les industriels français du nucléaire, mais rien à voir avec les discussions dans les institutions européennes.


En janvier 2023, la Belgique a décidé de reporter de 10 ans, de 2025 à 2035, la fermeture de ses deux réacteurs les plus récents (mis en service en 1985). Les quatre autres seront fermés à des dates correspondant à 50 ans après leurs mises en service. Par quoi les remplacer ? That is the question…

L’Allemagne, qui ne comptait plus depuis début 2022 que trois réacteurs nucléaires en service et avait décidé de les fermer fin 2022, a reporté ces fermetures au 16 avril 2023, pour éviter le risque de manque d’électricité pendant l’hiver2022-2023. Mais le 16 avril ces réacteurs ont été définitivement fermés comme prévu.

La Pologne, après appel d’offres, a choisi fin octobre 2022 l’américain Westinghouse pour la réalisation de ses premiers réacteurs nucléaires.


En France l’heure est à la relance de la construction de nouveaux réacteurs. On se souvient des fortes inquiétudes pour l’hiver 2022-2023, avec une anomalie générique découverte sur plusieurs réacteurs, arrêtés pour corriger cette anomalie, et en parallèle les questions rétrospectives autour de la fermeture des deux tranches de Fessenheim (février et juin 2020) sans raison technique ni de sûreté particulière, mais pour des raisons politiques. Soulignons qu’en France il n’y a pas de limite prédéfinie pour la durée d’exploitation d’une centrale nucléaire : tous les 10 ans une visite en profondeur de tous les systèmes est faite sous le contrôle sévère et minutieux de l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) qui au vu des résultats autorise ou non, ou sous conditions, la poursuite de l’exploitation.


Site de la centrale nucléaire de Paluel près de Dieppe


Ces quelques faits montrent bien la diversité en Europe des perceptions de l’énergie nucléaire, qui représente globalement 25 % de la production d’électricité de l’UE. Pour les uns c’est le diable, pour les autres c’est une nécessité, et les choses peuvent changer avec les aléas de la politique intérieure. Rappelons ce que voulait dire à l’origine EPR : European pressurized reactor, parce que c’était un projet franco-allemand, avant que l’industrie allemande ne s’en retire après 10 ans de collaboration…


Au niveau des institutions européennes, la « politique européenne de l’énergie » est limitée par le libre choix laissé aux États membres de définir leurs moyens de répondre à leurs besoins. L’UE contourne cette limitation en définissant des objectifs soit de résultats (plafonds d’émissions de gaz à effet de serre dans l’UE), soit de moyens (pour les énergies renouvelables), globalement ou par pays.

L’UE a ainsi défini les sources d’énergie contribuant à la décarbonation ; la liste constitue la « taxonomie énergétique européenne ». C’est clairement oui pour l’hydroélectricité, le solaire et l’éolien, clairement non pour le charbon ou le lignite, pour le reste… ça se discute et ça se dispute. L’Allemagne plaidait pour inclure le gaz naturel (combustible fossile, certes, mais qui à énergie égale émet moitié moins que le charbon), la France pour le nucléaire qui émet au moins 100 fois moins que le charbon. Les deux, gaz naturel et nucléaire, ont été inclus dans la taxonomie, à titre de solutions « transitoires », l’honneur de chacun est sauf.


La bataille s’est ensuite cristallisée sur les types de financements et les types de contrats de vente d’électricité pour ces moyens de production, le nucléaire demandant de gros investissements amortis ensuite par la production d’électricité à bas coût pendant une très longue durée. Par exemple les deux EPR qu’EDF construit au Royaume-Uni à Hinkley Point vendront leur production à un prix en partie garanti par l’État britannique : les opposants au nucléaire voient rouge quand on évoque ce type de contrat (contract for difference), « ce sont des aides publiques déguisées, interdites au nom de la concurrence libre et non faussée ». La question attend les discussions à venir sur les réformes du marché de l’électricité européen. Ça promet de belles empoignades.


En même temps la bataille a porté aussi sur l’hydrogène, considéré par beaucoup comme un futur « couteau suisse » de l’énergie, pour la chimie, la sidérurgie, les transports. Pas d’émission de CO2, que la vapeur d’eau !

Seul hic, et de taille : comment produire l’hydrogène ? Pour le moment 90 % de l’hydrogène est produit par du gaz naturel, avec beaucoup d’émission de CO2. Les autres 10 % sont produits par électrolyse de l’eau, mais avec quelle électricité, re-bataille : pour que l’hydrogène soit « vert » il faut évidemment que l’électricité utilisée le soit aussi ! Hé bien, disent les uns, avec du renouvelable (qui ne peut pas assurer une production électrique continue, ce qui est nécessaire pour rentabiliser les électrolyseurs, sauf à ajouter des installations de stockage d’électricité ou d’eau en altitude pour la produire qui obèrent la rentabilité), avec du nucléaire disent les autres.


Au 1er semestre 2023, la France a constitué autour d’elle une Alliance européenne du nucléaire, qui a vocation à « réunir tous les pays d’Europe souhaitant s’appuyer sur l’énergie nucléaire, aux côtés des renouvelables, pour mener à bien leur transition énergétique ». 16 pays (15 de l’UE et le Royaume-Uni, invité) ont participé à la réunion de mi-mai, certains comme observateurs.

Les opposants au nucléaire, « Amis des renouvelables », exigent que l’hydrogène « vert » soit produit par des énergies renouvelables, l’Alliance du nucléaire objecte que « limiter les objectifs à l’hydrogène renouvelable sans inclure l’hydrogène bas carbone ralentirait la décarbonation des transports et de l’industrie lourde».

En juin 2023, la Commission européenne a rédigé un projet de « Directive énergie renouvelable » qui

prévoit de façon contraignante pour l’ensemble de l’UE un objectif de 42,5 % d’énergie renouvelable en 2030 cet objectif avait déjà été adopté fin mars, reste à ce que les États se répartissent les moyens de l’atteindre… la France disant que son électricité émet déjà 5 fois moins de CO2 que celle de l’Allemagne) et que «toutes les solutions bas carbone, comme le nucléaire, seront prises en compte dans les actions de décarbonation du Net Zero Industry Act», alors que fin mars on parlait pour 2030 de 42 % d’hydrogène renouvelable (et non bas carbone, toute la nuance est là!) dans l’hydrogène consommé par les industries des engrais, de la chimie et de la sidérurgie.


Le match n’est cependant pas plié : Christian Ehler, le rapporteur allemand (PPE) de la Commission Énergie du Parlement européen, revient sur une position précédente et propose des amendements au Net Zero Industry Act qui pourraient écarter le nucléaire des priorités stratégiques.


Faucon pèlerin. Source : la salamandre


Terminons sur une note moins technique et plus consensuelle : CEZ, la compagnie d’électricité tchèque, a indiqué qu’en 2022 trois faucons pèlerins ont éclos à la centrale nucléaire de Temelin et quatre à celle de Dukovany, dans des nids installés sur des perchoirs installés au sommet de tours de réfrigération. En France, la centrale de Chinon avait ainsi vu naître deux faucons pèlerins au sommet d’un château d’eau.


Jean-Jacques SMEDTS





26 juin 2023 : l’ambassadeur de Suède en France était à la Maison de l'Europe





L’ambassadeur Åkesson a convaincu son auditoire que la Suède, qui présidait pour la troisième fois le Conseil de l’UE, a gagné son pari qui était de rendre une Europe plus sûre, plus libre et plus verte à l’issue de ses six mois de présidence.


Fidèle à sa tradition consistant à saluer chaque fin de semestre de présidence du Conseil de l’Union européenne, le MEF-30 s’est adressé à l’ambassade de Suède en France. C’est cette fois l’ambassadeur en personne que nous avons eu le privilège de recevoir le 26 juin pour nous présenter le bilan de la présidence du Conseil de l’UE assurée par son pays du 1er janvier au 30 juin 2023.


Privilège : le mot n’est pas trop fort car nous avons eu le plaisir de rencontrer un homme élégant, attentif, curieux de tout et de tous et surtout parfaitement à l’aise sur tous les dossiers dont il a rendu compte ou sur lesquels nous l’avons interrogé ; il y a souvent ajouté de l’humour, soulignant malicieusement par exemple que la Suède était en pointe dans le streaming musical : Spotify est suédois. Et de notre côté, nous l’avons remercié en rappelant à quel point, pour beaucoup, la Suède constituait un modèle sur le plan des valeurs et de la réussite, ce qui rend d’autant plus inquiétante la poussée d’extrême droite qu’on y observe.


Les lecteurs qui se satisferont d’une information assez générale sur le bilan de cette présidence peuvent arrêter là leur lecture ; il se satisferont sans doute de savoir que la Suède avait entamé ce semestre en affichant quatre priorités : sécurité et unité, compétitivité, transition écologique et transition énergétique, valeurs démocratiques et État de droit. Et pour en savoir plus, plusieurs sites sont disponibles, constamment mis à jour, notamment


Le présent article s’attache plus particulièrement à deux aspects de la présidence suédoise: le paquet «migrations/ droit d’asile » et le paquet « climat/énergie ».

Sur ces deux aspects, on trouvera beaucoup d’informations ici :


Mais celle ou celui qui veut en apprendre un peu plus est invité/e à poursuivre sa lecture, elle redonne confiance dans la résilience de l’Europe -au cas où on en douterait.


Il est vrai que le bilan de cette présidence suédoise est particulièrement conséquent. Sans doute était-ce le rôle de l’ambassadeur que de le revendiquer, mais la liste des acquis de ce semestre est impressionnante, et ce sur des sujets de première importance. C’est d’autant plus remarquable que certains de ces thèmes encombraient les ordres du jour européens sans qu’une vraie décision soit prise : c’est le cas notamment de la question des migrations et du droit d’asile en Europe, qui « traînait » depuis 2016, et sur laquelle un accord a enfin pu être trouvé.


Un accord : le mot est à prendre au sens européen, c’est-à-dire qu’il ne peut s’agir que d’un compromis, même s’il est passablement contraignant ; il faudra ensuite suivre sa mise en œuvre concrète et quotidienne. C’est le rôle de la Commission européenne, « gardienne des traités » et donc chargée de contrôler l’application des décisions.


Pour résumer, un effort sera entrepris pour soulager les pays de premier accueil -essentiellement l’Espagne, la Grèce, l’Italie et Malte), où les demandes d’asile sont obligatoirement enregistrées à l’arrivée ; c’est la procédure que prévoit le règlement de Dublin puisque l’asile est la voie utilisée par quasiment tous les migrants (sauf pour les étudiants et les demandeurs de rapprochement familial, et de plus en plus rarement les signataires de contrats légaux dits d’« introduction de main-d’œuvre »). Une relocalisation vers des pays moins directement impactés sera faite, et les États récalcitrants qui voudraient se soustraire à cette obligation devront verser une certaine somme (20 000 euros par migrant « refusé », ce n’est pas rien) au profit du budget de l’Union européenne affecté à ces programmes. En corollaire de ce volet « généreux », des mesures plus strictes sont arrêtées pour éconduire et même reconduire dans des délais raccourcis les personnes dont les demandes d’asile seront manifestement infondées.


Certains ne manqueront pas de dire que c’est l’Europe « forteresse » qui se barricade ainsi. C’est faire peu de cas de la réalité, qui conduit, dans l’intérêt même de certains demandeurs d’asile, à les décourager d’entreprendre un périple périlleux et souvent voué à l’échec. Cette décision doit de toute façon passer sur le gril du Parlement européen qui ne manquera pas de la discuter et peut-être de la remodeler. Cela se fera de toute façon dans le cadre de ce qu’il est désormais convenu d’appeler le « trilogue », la Commission devant prendre en compte les textes adoptés au Conseil, puis discutés au Parlement, pour aboutir à une rédaction définitive et réellement applicable.


La vérité oblige donc à dire que même lorsqu’on crie victoire, il faut se méfier d’un effet d’annonce : une décision publiée n’est pas toujours, tant s’en faut, immédiatement exécutoire. C’est évidemment le cas ici.


Tout autres sont les avancées en matière de Pacte vert, transition énergétique, accompagnement du changement climatique, etc. Il est vrai que sur ce point les choses avancent depuis l’entrée en fonctions de la Commission von der Leyen, il était donc relativement plus facile de mettre la touche finale à des démarches déjà engagées, parfois sous présidence française ou tchèque (les deux présidences précédentes). Les acquis n’en sont pas moins considérables, et encourageants, qu’on en juge. Même si on n’en fait jamais trop …


La liste en serait longue et fastidieuse, mais il suffira sans doute, à ce stade, d’évoquer la question des « quotas carbone » pour comprendre que les décisions seront d’application rapide et spectaculaire. De quoi s’agit-il ? Les « quotas carbone », concept dont le nom complet est « système d'échange de quotas d'émission de dioxyde de carbone et des autres gaz à effet de serre », en abrégé SEQE, consiste à faire payer les producteurs d’émission en fonction des tonnes de CO2 (et autres gaz) que leur activité produit. Pour faire simple, c’est donc un système dit de « pollueur-payeur » : il récompense les vertueux qui font des efforts et pénalise les négligents : ceux-ci, moins compétitifs, sont donc voués à perdre des parts de marché.


Ce système existe déjà, il fonctionne, même si les choses ne vont jamais assez vite, mais les décisions prises sous présidence suédoise en ont renforcé les dispositions de manière assez draconienne : en abaissant les plafonds de déclenchement du paiement des pénalités, en étendant le système à des secteurs qui en étaient jusqu’ici exonérés en tout ou partie (par exemple le transport maritime, gros pollueur, et bien sûr le transport aérien, largement épargné jusqu’ici).


Dans le même esprit, un système d’ajustement aux frontières, dans les tuyaux depuis plusieurs années, a été adopté sous présidence suédoise sous son nom complet de Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ou MACF. L’idée étant bien sûr non seulement de décourager les industries qui voudraient délocaliser leur activité pour échapper aux quotas d’émissions, mais aussi de porter les coûts des importations marquées par une forte empreinte carbone au niveau (presque au niveau, n’exagérons pas) des coûts européens supportant la taxe carbone. Au hasard, l’acier chinois -et peut-être aussi l’acier coréen ou américain- perd ainsi son avantage en termes de compétitivité-prix : qui s’en plaindra ? Encore faut-il que la sidérurgie européenne soit, ou redevienne compétitive ; mais c’est évidemment une façon de l’y encourager.


Du reste, sur ce plan, la Suède dame le pion aux autres pays de l’UE, avec son aciérie de Kiruna, dans le grand nord du pays, entièrement décarbonée : l’acier -certes à partir d’un minerai de qualité exceptionnelle- y est fabriqué avec de l’hydrogène produit par des sources d’énergie entièrement renouvelables. Qui dit mieux ? Soulignons que le Fonds européen pour l’innovation a apporté 143 millions d’€ à cette réalisation.


Mais s’agissant d’accompagnement du changement climatique, la Suède, bonne élève comme souvent, a aussi permis l’accouchement d’un Fonds social pour le climat, abondé précisément par ces fameux quotas carbone, dont le rôle sera de financer concrètement -au-delà donc des fortes paroles de la présidente de la Commission européenne- une transition « juste » pour atténuer les effets du nouveau système d'échange de quotas d'émission sur les ménages vulnérables, les micro-entreprises et les usagers des transports.


Bien d’autres décisions encore ont été prises en matière d’énergies renouvelables, de transition énergétique, dont on pourra dans un proche avenir vérifier le caractère à la fois ambitieux et réaliste. Encore une fois, c’est le rôle de la Commission d’y veiller.


Et bien sûr, au-delà des objectifs en quelque sorte « internes » liés à la construction européenne proprement dite, la Suède a été, comme nous tous, confrontée à la situation dramatique et en constante évolution entraînée par la guerre de la Russie à l’Ukraine. Comme les autres pays et même un peu plus, puisque la Suède a demandé, dès les premiers jours de la guerre, à être admise dans l’OTAN.


Un auditoire attentif suit la conférence de l’ambassadeur Åkesson.



L’ambassadeur Åkesson a d’abord rappelé que la Suède, autrefois grande puissance militaire, protégeait sa neutralité depuis 1814. Et il a ensuite sidéré son auditoire en indiquant dans quelle proportion et avec quelle rapidité l’opinion publique en Suède, jusque-là très majoritairement hostile à tout engagement atlantique, a viré de bord et souhaite désormais ardemment la protection, qui n’est pas que symbolique, que représente l’appartenance à l’OTAN. La Finlande, également demandeuse, a été définitivement intégrée le 4 avril 2023. La Suède, jusqu’ici blackboulée par la Turquie qui voulait la punir pour avoir -entre autres- « laissé faire » une manifestation (d’extrémistes minoritaires, certes) au cours de laquelle un Coran avait été brûlé devant l’ambassade de Turquie, semble avoir désormais bon espoir (malgré ou grâce à la réélection d’Erdogan), de voir ce veto levé. Il a fallu pour cela que le gouvernement annonce des mesures qui, sans attenter à la liberté d’expression, sacrée en Suède comme ailleurs, pourraient lui permettre d’interdire les démonstrations de ce type au motif d’atteinte à l’ordre public. La Suède a-t-elle pour autant mangé son chapeau ? « Paris vaut bien une messe » disait un jour (à ce qu’on raconte) un certain Henri IV.


Quoi qu’il en soit, il est certain que, sous présidence suédoise, la cohésion européenne face à la Russie et aux côtés de l’Ukraine ne s’est ni délitée ni affaiblie. Au contraire, l’ambassadeur a souligné l’extension et le renforcement des sanctions prises à l’encontre de la Russie, et la détermination des États-membres à soutenir l’Ukraine sur tous les plans. Cela vaut notamment pour la Suède, qui pour protéger sa neutralité a très tôt créé une industrie de défense, y compris dans le secteur de l’aviation (avec Saab).


Bref, sur un plan général, l’ambassadeur Åkesson a convaincu son auditoire que la Suède, qui présidait pour la troisième fois le Conseil de l’UE (après 2001 et 2009), a gagné son pari qui était de rendre une Europe plus sûre, plus libre et plus verte à l’issue de ses six mois de présidence. L’Espagne prend le relais au 1er juillet, dans des conditions à la fois favorables compte tenu de ce bon bilan, mais sans doute aussi un peu compliquées, du fait des élections législatives convoquées pour le 23 juillet. Bon courage !


Jean-Luc BERNET





Les nouvelles de la Maison de l'Europe




De nouveaux statuts pour la Maison de l’Europe


La Maison de l’Europe évolue, s’adapte aux nouveaux modes de fonctionnement et développe de nouvelles compétences. Nos statuts qui datent de 2014 étaient un peu à la traine et une réforme de ceux-ci était nécessaire.


Le 8 juin nous avons tenu notre Assemblée générale ordinaire pour renouveler notre Conseil d’administration, élire de nouveaux administrateurs et un nouveau bureau, suivie par une Assemblée générale extraordinaire visant à modifier nos statuts mais faute de quorum elle a été reconvoquée le 23 juin, suivie d’une nouvelle Assemblée générale ordinaire qui a confirmé, dans le cadre de ces nouveaux statuts, les décisions prises le 8 juin (sous l'empire des anciens statuts).


Les changements les plus importants sont :

  • La création d'un deuxième collège regroupant nos partenaires personnes morales avec lesquelles nous travaillons activement.

  • L'augmentation du nombre maximum d'administrateurs de 20 à 25 et l'allongement de leur mandat à 3 ans.

  • La possibilité de réunir une Assemblée générale ordinaire en visio-conférence, tenant compte de l'expérience vécue lors de la pandémie.

  • La création d'un règlement intérieur.

Nous dégageons un bilan positif en augmentation par rapport à l’an dernier et nous devons désormais recourir aux services d'un commissaire aux comptes.


Je rends hommage à toute l'équipe qui a contribué à obtenir ce beau résultat, les salariés animés par notre directeur Michael Stange et les bénévoles, parmi lesquels notre président Charles-Antoine Roussy que je remercie pour son action efficace au cours de ces trois dernières années chahutées par la pandémie et ses conséquences.

L'Assemblée générale ordinaire a renouvelé le Conseil d'administration et le bureau avec l'entrée de nouvelles personnalités. Vous trouverez ci-après la liste des administrateurs.



Membres du Conseil d'administration 8 JUIN 2023

​Nom

Fonction

1er collège:

1 - ARNAUD Franck

Membre du bureau

2 - BERNET Jean-Luc

Vice-président

3 - BESSON Pascal

Administrateur

4 - BOURQUIN Frédéric

Président

5 - DAGANI Colette

Secrétaire générale- adjointe

6 - FICHAUX Michel

Trésorier

7 - GAUTIER Jacques

Administrateur

8 - GIAI-MINIETTI Michela

Secrétaire générale

9 - GUYOT Kathy

Administrative

10 - HARARY François

Trésorier-adjoint

11-JULLIAN-UIJTTENBOOGAART Véronique

Vice-présidente

12 - MAYERL Colette

Administratrice

13 - PAMULA Salomea

Administratrice

14 - RAEPSAET Eddy

Administrateur

15- ROUSSY Ch.-Antoine

Administrateur

16 - ROUSSY Isabelle

Administratrice

17 - SMEDTS Jean-Jacques

Membre du bureau

2nd collège:

BERGERI Carole

suppléante MEUNIER Hélène

Conseil départemental du Gard

CAMPELLO J-Marc

représentanté par KARZAZI Alia

Ville de Nîmes

Lycée CCI du Gard

Mission locale d’Alès

Mission locale de Bagnols-sur-Cèze


Avec ce nouveau cadre institutionnel, un conseil renouvelé, notre association pourra continuer sa progression tout en consolidant sa situation financière et je suis fier de la confiance que vous m'accordez pour cette tâche.


Frédéric Bourquin, président de la Maison de l'Europe



Des vacances pour la Maison de l’Europe mais nos cours de langues reprennent prochainement !



La fin de l’année est déjà là pour la Maison de l’Europe ! Nous fermerons nos portes du 31 Juillet 2023 au 15 août 2023 inclus.


L'apprentissage d’une ou plusieurs langues vous intéresse ?

Nous vous donnons rendez-vous pour une nouvelle année d’activité linguistique.

Nous organisons, du 18 au 22 septembre 2023, des réunions d’information pour chaque langue. L’équipe de la Maison de l’Europe et les formatrices et les formateurs seront présents pour répondre à vos interrogations administratives et pédagogiques.

Venez également nous retrouver au Forum des associations, le samedi 9 septembre 2023, Esplanade Charles de Gaulle à Nîmes.

Mais, d’ici là, passez un bel été.











POUTINE DEVANT LA JUSTICE ?




Peut-on espérer voir un jour les dirigeants et militaires russes déférés devant la justice pour les crimes commis en Ukraine ?


Le droit à la justice n'est qu'un de ceux réclamés par les victimes. Elles ont d'autres exigences comme le droit de savoir ce qui s'est réellement passé, le droit à la réparation des préjudices subis et le droit de ne plus subir de nouveau une situation semblable.

Photomontage … ukrainien évidemment.


Quelles sont les particularités de la justice internationale pénale ?


Elle est en conflit avec la souveraineté des États et ne poursuit que les crimes de masse les plus graves. Sans structure étatique de soutien donc pas de police, pas de prisons, il lui faut donc obtenir la coopération des États pour arrêter les suspects et détenir les condamnés.

Elle ne s'appuie pas sur un code pénal mais sur des conventions internationales et la jurisprudence des tribunaux internationaux. Le droit international est interprété très librement par les juges puisqu'il n'y a pas de Cour de cassation.


Elle est influencée par le droit anglo-saxon (common law), c'est à dire qu'il n'y a pas d'instruction préalable et les juges arbitrent entre les parties : le procureur et la défense.

Il n'y a pas de parties civiles ni de condamnation par contumace (« in absentia ») comme en droit continental.


Courte histoire de la justice internationale


Pourquoi une justice pénale internationale ?


L'ampleur de certains crimes très graves interpelle la « communauté internationale ».

Jusqu'au XIXème siècle, le droit international ne s'intéressait qu'aux relations entre États mais depuis le début du XXe siècle, les guerres affectent de plus en plus les populations civiles.

Une première tentative avait avorté ; le traité de Versailles (1919) et le traité de Sèvres (1920) prévoyaient la création de juridictions internationales devant juger d'une part le Kaiser et d'autre part les auteurs du massacre des Arméniens mais rien n'a été fait en fin de compte.

Les atrocités commises à l'encontre des civils lors de la Seconde guerre mondiale ont amené à la création d'une justice internationale pénale pour punir les crimes de masse.

Les Alliés créent alors les Tribunaux militaires internationaux de Nuremberg (1945) puis pour l'Extrême-Orient (1946) pour juger le crime contre la paix, les crimes de guerre et contre l'humanité des dirigeants nazis et japonais.


La deuxième génération de tribunaux pénaux internationaux est apparue à la faveur de la fin du bloc communiste; le Conseil de sécurité des Nations Unies crée alors deux tribunaux pénaux internationaux pour juger les crimes de génocide, de guerre et contre l'Humanité en ex-Yougoslavie (T.P.I.Y) en 1993 et au Rwanda (T.P.I.R) en 1994. Ils sont entièrement internationalisés et ont la primauté sur les tribunaux nationaux.


En 2003 naît la troisième génération, les tribunaux hybrides c'est à dire des tribunaux « ad hoc » composés de juges nationaux et internationaux. Ils ont été créés avec l'accord des gouvernements locaux des pays dévastés par des conflits : Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Sierra Leone, Cambodge, Timor Leste, Chambres extraordinaires africaines (jugement d'Hissein Habré, dirigeant tchadien), Liban.


Enfin, en 1998 est créée la Cour pénale internationale (C.P.I.) qui se veut universelle et permanente même si elle subit quelques critiques : on l'accuse d'être une justice sélective, au service des vainqueurs et la longueur des procès. Certains États n’en veulent pas : États-Unis, Russie, Chine, Inde, Iran, pays arabes...


Quels crimes juger après un conflit ?


Quatre crimes considérés comme les plus graves et donc imprescriptibles :

  • Crime de génocide

Ce crime se caractérise par l'intention de détruire, en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux.

  • Crimes contre l'humanité

On entend par crime contre l'humanité une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile.

  • Crimes de guerre

Les crimes de guerre sont des actes graves qui, dans le cadre d'un conflit armé, visent des personnes ou des biens protégés par les dispositions des Conventions de Genève, non justifiés par des nécessités militaires.

  • Crime d'agression

On entend par crime d’agression la planification, la préparation, le lancement ou l’exécution par une personne effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l’action politique ou militaire d’un État, d’un acte d’agression qui, par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies.

La Cour pénale internationale


C'est une cour permanente, sise à La Haye (Pays-Bas) créée par le traité de Rome en 1998, elle fonctionne depuis 2002. Elle a un accord avec l'O.N.U.

Sa compétence est subsidiaire, c'est à dire qu'elle n'intervient que lorsque les tribunaux nationaux ne peuvent pas fonctionner (État déliquescent) ou lorsqu'ils ne veulent manifestement pas poursuivre les criminels (pressions politiques).

Elle emploie 900 salariés dont 18 juges et reconnaît 6 langues officielles : arabe, chinois, espagnol, russe dont 2 langues de travail ; français, anglais. Son budget est de 170 millions €/an.


Compétences de la Cour pénale internationale


  • La compétence d'attribution (« Ratione materiae »)

Les crimes poursuivis sont ceux de guerre, contre l'humanité, de génocide (depuis 2002 pour ces 3 crimes), et crimes d'agression (depuis 2018).

  • La compétence territoriale (« Ratione loci »)

Lorsque les juridictions nationales n'ont pas la volonté ou la possibilité d'exercer des poursuites, alors la Cour peut exercer sa compétence si :

- Le crime est commis sur le territoire d'un État partie (c'est-à-dire qui a ratifié les conventions d'adhésion à la CPI),

- Ou commis par un ressortissant d'un État partie,

- Ou si un État non-membre a accepté la compétence de la Cour pour un crime donné (ex: Côte d'Ivoire, Autorité palestinienne, Ukraine)

- Ou si la situation est déférée par un État membre (ex: Ouganda, R.D.C, R.C.A, Mali),

- Ou si le procureur s'est auto-saisi (ex: Kenya).

- Ou si la situation est déférée au procureur par le Conseil de sécurité en vertu du chapitre VII de la Charte de l'O.N.U. Dans ce cas, les conditions précédentes ne s'imposent pas (ex: Darfour, Libye).

  • La compétence temporelle (« Ratione temporis »)

La compétence de la Cour ne peut s'exercer que pour les crimes commis après sa création effective en 2002 et, pour les États ayant adhéré postérieurement, après la date officielle de leur adhésion.

  • La compétence personnelle (« Ratione personae »).

La compétence de la Cour ne s'exerce qu'à l'encontre des personnes physiques mais en aucun cas à l'encontre des personnes morales (partis politiques, associations, entreprises...).


Organisation de la Cour pénale internationale


La Cour est une organisation internationale autonome. Elle comprend :

L'assemblée des États parties : C'est le « parlement » de la Cour : chacun des 123 États membres dispose d'une voix. Ni la Russie, ni les États-Unis, ni la Chine, ni l'Inde, ni Israël ne sont membres.

Le Procureur

Les organes de jugement : la section préliminaire, la section de première instance, la section d'appel, les audiences sont publiques (sauf instauration du huis clos et multilingues).

Le greffier


Procédure devant la Cour pénale internationale


Une « situation » peut être déférée au procureur par le Conseil de sécurité de l’O.N.U., un État partie ou encore le procureur peut s'auto-saisir.

Le procureur ouvre un « examen préliminaire » puis éventuellement une « enquête » avec souvent le concours d'États parties et d'O.N.G.

Si la situation est déférée par le Conseil de sécurité, tous les États membres de l'O.N.U. doivent coopérer avec la Cour ; sinon, seuls les États parties sont tenus de coopérer.


Quels sont les tribunaux pénaux susceptibles de juger les crimes en Ukraine ?


- Les tribunaux nationaux russes ou ukrainiens : Y aurait-il une véritable volonté politique de poursuivre les criminels ? La justice rendue serait-elle impartiale ?

- La Cour pénale internationale

La C.P.I pourrait-elle juger les dirigeants russes ? Elle a, en principe, les compétences nécessaires mais ni la Russie ni l'Ukraine se sont des États parties de la C.P.I.

Pour le crime d'agression, la Cour pénale internationale ne peut guère activer cette compétence pour les États n'ayant pas ratifié cette extension de la compétence, sauf si le Conseil de sécurité déférait la situation au procureur mais la Russie exercerait alors son droit de veto.

Pour les crimes de guerre et contre l'Humanité : il n'y a pas d'immunité des dirigeants mais il serait difficile de leur imputer ces crimes car ils sont éloignés des lieux de commission. Cependant, il serait possible de poursuivre les chefs militaires intermédiaires.

Le crime de génocide est très difficile à activer : y-a-t-il des actes visant à détruire, en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ?


- Et si on créait un tribunal « ad hoc » ?

Qui peut créer un tribunal « ad hoc » (c'est à dire dont les seules compétences seraient, par exemple, le jugement des crimes commis en Ukraine depuis 2014) ?

- le Conseil de sécurité des N.U ? (Chapitre VII de la Charte) : probable veto de la Russie !

- l'Assemblée générale des N.U ? (Résolution 377 3/11/1950) à la majorité des 2/3 : le fondement juridique est fragile car, d'après la Charte de l'O.N.U., seul le Conseil de sécurité est compétent en matière de sécurité.

- le Conseil de l'Europe ? L'Ukraine en fait partie mais plus la Russie.

- l'Union européenne ? Ni l'Ukraine, ni la Russie ne sont membres.

- un accord entre l'O.N.U. et quelques États ? Lesquels ?


Quelques pas vers la justice


Le 27 février 2022, l’Ukraine a lancé une action contre la Russie devant la Cour internationale de justice (qui juge uniquement les différends entre Etats). Le 16 mars 2022, la C.I.J ordonne à la Fédération de Russie de "suspendre immédiatement ses opérations militaires en Ukraine".

Le 19 janvier 2023, le Parlement européen appelle à la création d'un tribunal pénal « ad hoc » pour juger les dirigeants politiques et militaires russes pour qu'ils soient tenus responsables du crime d'agression contre l'Ukraine : 472 voix pour, 19 contre et 33 abstentions.

Le 17 mars 2023, la C.P.I a délivré des mandats d'arrêt à l’encontre de deux personnes dans le cadre de la situation en Ukraine : Vladimir Vladimirovitch Poutine, Président de la Fédération de Russie, et Maria Alekseïevna Lvova-Belova, Commissaire aux droits de l'enfant au sein du Cabinet du Président. La Chambre préliminaire a confirmé qu’il existait des motifs raisonnables de croire que la responsabilité pénale du Président Poutine et de Mme Lvova‑Belova était engagée concernant la déportation illégale et le transfert d’enfants ukrainiens de zones occupées en Ukraine vers la Fédération de Russie.


Poutine peut-il être jugé ?


Les verrous actuels empêchant de le juger : Le veto russe au Conseil de sécurité ; La non-ratification par la Russie du statut de Rome créant la CPI ; La condamnation par contumace n'est pas prévue par la C.P.I.


Les voies de contournement possibles : Une résolution de l'Assemblée générale de l'O.N.U. créant un tribunal « ad hoc » ; Un accord international créant un tribunal « ad hoc »; Un rebondissement de l'histoire : un changement de régime à Moscou !


Mais il y a un préalable : L'arrestation de Vladimir Poutine ! Le président russe évitera probablement de se rendre dans un pays membre de la C.P.I qui devrait (!) alors procéder à son interpellation.


Donc, ce n'est pas demain que nous verrons Poutine devant la justice mais l'histoire est riche de rebondissements: pensait-on en 1940 pouvoir juger en 1945 les principaux dignitaires nazis encore vivants ?


Résumé de la conférence de Frédéric Bourquin du 8 juin 2023





Les jeunes bougent avec l’Europe : stages professionnels à Berlin




Nous arrivons à Berlin par une nuit froide dans l’ignorance certaine du printemps qui viendra. Nous sommes le 23 avril et le 1er jour des 42 suivants. Le ciel est aussi électrique que je l’imaginais, incrusté d’étoiles qui grésillent sous le courant de la lune. Plus tard, ce sera l’hôtel et le premier Döner.


On apprendra à connaître ses premiers battements de cœur, des pas plus rapides que sa musique techno pour parcourir les veines de cette ville au grand corps. Puis la vie file. Nos traces marquent un peu plus Berlin, nos mots se joignent au brouhaha de la ville, on y connaît ses aubes et ses après-midi, ils deviennent les perles du long collier qu’on crée et forment ce que l’on peut appeler : « La routine berlinoise ».



Les stages furent quant à eux une source d’échange. La langue devenait l’angle par lequel percevoir la vie des autres, partager et échanger sur nos cultures, plonger dans ces vies que nous ignorions. Une occasion d’éclore dans un domaine qui nous passionne, ou bien d’être force de proposition, d’apporter sa touche de couleur à un tableau qui ne nous convenait pas entièrement et d’apprendre de sa différence.


Cet échange de culture et de vision est de toute évidence le fruit d’une expérience à l’étranger, car l’ouverture d’esprit est ce qui nous offre le plus de nouveauté.


Une fille de notre Erasmus, Séphora, a pu prendre des photos de pièces Vintage et en vendre, elle aimait l’ambiance dans laquelle elle baignait ce qui rendait son travail bon et toujours énergique, Thibaud de son côté réalisait un court-métrage sur Berlin, voguant de place en place à la recherche du meilleur point de vue.

Certains à l’inverse furent surpris de constater que ça ne leur correspondait pas et communiquèrent avec leur tuteur afin de trouver un compromis, ainsi comme dans chaque épreuve ils découvrirent qu’une part de lumière les y attendrait toujours.


S’ils n’y trouvaient pas leur bonheur, ils relativisaient, trouvaient à côté de leur stage un bout du voyage plus intéressant à explorer. L’important était d’aller au bout, de trouver dans chaque situation une façon de l’améliorer, de la colorer. D’autres n’avaient que très peu d’heures et en ont profité pour visiter davantage la ville.

Peu importait le chemin emprunté, on y apprenait.


Puis à côté de cela, les moments se succédaient.

 On s’attardait devant un nouveau coucher de soleil en haut de Mauerpark, on goûtait au currywurst dans des marchés improvisés, rejoignait le groupe Erasmus pour se raconter nos journées en espérant que demain aurait encore plus à nous dévoiler.

 On croisait au détour d’une rue, d’un café une personne qu’on n’oubliera pas, on se perdait pour mieux se retrouver, papiers égarés mais problèmes résolus, la vie s’accélérait dans une succession de trains loupés et d’itinéraires changés.


De liens noués.


Peu importe où on allait le S-bahn nous y attendrait et après ce feu rouge interminable au clignotement inoubliable, après ces vélos aux courses effrénées, il y aurait toujours ces grands parcs dans lesquels se poser, les Spatti par lesquels passer et les photoautomat pour immortaliser.


On vivait et il n’existait pas mieux.


J’ai eu des hauts et des bas, mais j’ai fait de mes bas des marches vers la hauteur. L’avantage d’un Erasmus, c’est qu’il y aura toujours ici et là-bas des personnes pour vous aider et vous conseiller. Vous encadrer. Rien de bien risqué.


Source inépuisable de nouvelles expériences.


Écrit par Clarisse Plichart




Voyagez avec les cafés linguistiques et Multi Kulti !




Les Cafés Multi Kulti et les Cafés Linguistiques sont deux événements publics auxquels participent tous ceux qui le souhaitent. Au cours de l'année, nos 11 volontaires ont présenté leurs pays sur le plan tant culturel que linguistique.

Au « Café Olive », chaque mois, vous avez pu "voyager" dans un pays différent, non seulement en Europe, mais aussi dans d'autres parties du monde. Les invités de la soirée ont toujours eu l'occasion d'apprendre de nouvelles choses sur d'autres pays et même de goûter des plats et des boissons.