Que fait l’Europe pour que l’Intelligence Artificielle soit au service de l’Humain ?
Source : Michael Dziedzic
Cette conférence s’est déroulée le 12 décembre dernier à l'Université de Nîmes
Trois intervenants aux compétences complémentaires ont animé ce débat.
· Charles CONDEVAUX, Professeur à l'Université de Nîmes, spécialiste de l'apprentissage des I.A.
· Martin ULRITCH, membre de la DG Connect, Commission Européenne - en visio -
· Diego TELES DA SILVA, Professeur de Droit à l'Université de Nîmes, spécialiste des problèmes juridiques liés aux I.A.
Animation : Dr C.A. Roussy
Le Pr CONDEVAUX est tout d'abord intervenu pour définir ce qu'est l'Intelligence Artificielle ou plutôt ce que sont les I.A. car il en existe plusieurs sortes. Les principales sont :
1) L'I.A. basée sur des règles : Dans les entreprises, cette forme d’I.A. est souvent utilisée pour automatiser des processus simples et répétitifs. Par exemple, les chatbots qui répondent aux questions fréquemment posées par les clients ou les systèmes de gestion des ressources humaines qui traitent les demandes de congés en fonction de règles prédéfinies.
2) L’I.A. générative : est un type d’I. A. capable de créer de nouveaux contenus et idées, notamment des conversations, des histoires, des images, des vidéos et de la musique. C'est le cas de Chat GPT, Bard, Vertex...Il en existe plusieurs dizaines dont certaines sont spécialisées pour le dessin ou les images par exemple. Il suffit de dire « dessine-moi un chat noir avec un chapeau dans une forêt » et vous aurez instantanément plusieurs dessins correspondant à la demande.
3) L'I.A. d'apprentissage (ou deep learning) qui a révolutionné de nombreux domaines des entreprises, notamment la vision par ordinateur, la reconnaissance vocale, la traduction automatique et la recommandation de produits. Les entreprises exploitent ces technologies pour automatiser des tâches intensives en données, améliorer l’efficacité des opérations et créer des expériences clients plus personnalisées.
Il conclut en expliquant les avancées fulgurantes en cours (tout change en quelques mois) liées notamment à la simplification des outils, et les impacts considérables sur certaines professions qui vont disparaître à très court terme comme les traducteurs ou les acteurs.
M. ULRICH de la DG CONNECT rappelle que ces I.A. posent de nouveaux problèmes à tout le monde. Chat GPT invente des arrêts de la Cour de justice de l'Union Européenne, par exemple. Depuis 2010 l’U.E. finance la recherche en I.A. En 2018 est apparu la nécessité d'une « éthique » des I.A. et la Commission Européenne a mis en place un livre blanc pour développer une stratégie commune. Depuis 2021 l’U.E. travaille sur un règlement général pour les I.A. qui vient d’être approuvé dans ces principes par le Parlement européen il y a quelques semaines. Mais il faut bien comprendre que c'est très complexe. D'abord parce que, pour la première fois, il n'existe aucune antériorité et qu'il faut donc créer un droit « ex nihilo », d'autre part parce que le sujet évolue si vite que les textes seront toujours à la traîne de la recherche.
Il s’agit d’instaurer le tout premier cadre légal au niveau mondial encadrant ces innovations, afin de placer l’Union européenne comme pionnière des technologies éthiques, grâce à la mise en place de normes internationales basées sur une classification simple :
1. L’intelligence artificielle présentant des “risques minimes”
2. Celle avec des “risques acceptables” ;
3. celle possédant des “risques élevés” :
4. Les systèmes d’intelligence artificielle “inacceptables” : reconnaissance faciale, identification biométrique, analyse policière prédictive, détection des émotions, collectes d'images faciales…
Le Pr DA SILVA expose ensuite les difficultés d'une régulation des I.A. Elles sont nombreuses liées au caractère géographique du droit, au paradoxe de vouloir favoriser d'un côté et réguler de l'autre, à la position des USA, de la Chine etc...
Un autre point crucial est que les enregistrements, les photos ou les vidéos ne pourront rapidement plus être pris comme preuves en raison de la facilité et de la qualité des trucages apportés par l' I.A.
Par ailleurs la question de la propriété des œuvres crées par l'I.A. n'est pas réglée.
Les I.A. ont besoin de masses énormes de données pour faire de la recherche, mais l'Europe est très frileuse pour la création de telles bases qui ne sont pour le moment développées que par les GAFAM. Ceci est très préjudiciable à notre avenir.
Les questions posées par l'assistance ont largement porté sur la question de la destruction des emplois par l'I.A. Celle-ci est inévitable mais impactera surtout les professions intellectuelles. Le nombre de notaires, d'avocats va se réduire considérablement car l'I.A. entrainera le maintien de seulement quelques-uns qui pourront travailler beaucoup plus vite et mieux. Cependant l'I.A. ne sera pas gratuite à terme, et donc les activités de bas niveau et de bas salaire, qui sont les plus nombreuses, ne devraient pas être trop impactées.
Une conférence passionnante selon tous les participants, à renouveler rapidement car le sujet évolue de façon exponentielle.
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