UN TRISTE ANNIVERSAIRE ET UNE LUEUR D'ESPOIR
1950, il y a 70 ans, au siècle dernier.
Le 9 mai, un homme politique français fait une proposition stupéfiante, 5 ans après la fin de la guerre : mettre en commun avec l'ennemi d'hier le potentiel industriel qui permet de fabriquer des canons, des chars, des avions.
Cet homme, Robert Schuman, avait-il les qualités d'un homme politique de notre époque? Oh que non ! Il n'était pas charismatique ni médiatique ; c'était un médiocre orateur, il n'avait pas un ego surdimensionné, ne vivait pas dans le luxe « bling-bling » et, défaut qui serait rédhibitoire de nos jours, il était modeste ! Ses homologues des pays voisins (les plus célèbres étant Konrad Adenauer, Alcide de Gasperi et Paul-Henri Spaak) mirent de côté les intérêts immédiats de leur pays, leur fierté nationale et résistèrent aux pressions de leurs milieux économiques (les lobbys comme on dirait maintenant) : ils acceptèrent cette proposition folle!
Moins d'un an après, le 18 avril 1951, les gouvernements de 6 pays s'étant fait la guerre à outrance signèrent le traité concrétisant cette idée, c'est-à-dire la Communauté européenne du charbon et de l'acier (C.E.C.A.).
Le 24 octobre 1950, un autre homme politique français, René Pleven, lançait l'idée iconoclaste d'une armée européenne, ouverte aux Allemands, les ennemis d'hier ! Un an et demi après, le 27 mai 1952, le traité créant la Communauté européenne de défense était signé par les six de la C.E.C.A * .
Et enfin, le 4 novembre 1950, les gouvernements de 10 États européens signaient un document révolutionnaire, la Convention européenne des droits de l'Homme. Elle mettait en place un système permettant à n'importe quel citoyen de faire valoir ses droits face à son État !
2020, le millénaire suivant !
21 février : Les États membres de l'U.E chipotent sur des chiffres après la virgule et n'arrivent pas à se mettre d'accord sur le budget de l’Union
Mi-mars : Une pandémie d'une ampleur historique frappe l'Europe ; chaque gouvernement réagit en ordre dispersé, sans aucune solidarité vis-à-vis de ses voisins, chipant les masques destinés à un autre pays, interdisant l'exportation de matériels sanitaires, fermant sans concertation ses frontières...
26 mars : Les chefs d’États ou de gouvernements s'insultent au Conseil européen car les radins ne veulent pas mettre la main à la poche pour financer un plan de relance à la hauteur de la déstabilisation de l'économie européenne.
Mai : Les fameux Coronabonds (obligations européennes) n'ont toujours pas été mis en place.
Et pourtant, nous avons des hommes politiques brillants, charismatiques, médiatiques, assistés de kyrielles de conseillers !
Heureusement, il y a des lueurs d'espoir ! Trois exemples :
– Des Britanniques, pourtant abreuvés de mensonges par une presse de caniveau, défilent avec des drapeaux européens alors que le 31 janvier est leur « independence day » qui les a "délivrés de la bureaucratie européenne" !
– Des jeunes se mobilisent sur Internet (#70Schuman) pour célébrer avec enthousiasme l'anniversaire de la déclaration de Robert Schuman. Demain, cette génération nous fournira-t-elle des dirigeants à la hauteur des enjeux ?
– La France et l'Allemagne puis la Commission européenne ont présenté récemment des plans de relance d'une ampleur inattendue (voir la Tribune); que l'un ou l'autre soit – approuvé par les États membres, il devrait limiter les conséquences économiques de la pandémie.
Ursula von der Leyen présente son plan de relance
Frédéric Bourquin, président de la Maison de l'Europe de Nîmes
* Ce beau projet sera sabordé en 1954 par l'Assemblée nationale française à cause d'une question de procédure !
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